Il a fallu vider les trois chambres des enfants, enfin plus exactement il a fallu trier les objets. Ils avaient déjà, plus ou moins selon chacun, emporté un peu de leur enfance au fil des ans, puis de leur adolescence et de leurs week-end étudiants. Il restait encore des livres, des photos, des bricoles, beaucoup de bricoles oui, tous ces petits trucs qu’on garde dans les tiroirs et qui ne servent à rien seulement qu’à se souvenir.
Et puis, on a refait les sols, les peintures, un peu de tapisserie, c’est joli. Enfin, Caroline surtout. C’était doux de voir cette formidable artisane s’emparer de l’espace avec beaucoup de talent et de joie. Elle m’a laissé le temps de raconter des bouts d’histoire. C’était bien. On va changer les rideaux, se réapproprier les lieux. Mais cette chambre sera pour eux quand ils viendront, celle-ci pour les petites-filles et celle-là, oui, bien sûr ils l’utiliseront aussi s’ils restent tous pendant des vacances, un samedi soir. Cela aussi a fait sourire Caroline quand je continuais à lui indiquer la chambre de notre grande, celle de notre fils et celle de notre plus jeune. “Vous avez gardé leurs prénoms comme accrochés à leurs portes.”
Il a fallu vider les trois chambres de leur enfance mais j’ai tout gardé oui. En moi, au cœur. Je crois que ça me fait du bien aussi pour vieillir de laisser aller un peu le temps qui passe, de le laisser partir. Je me réapproprie l’espace sans eux tout le temps, avec eux autrement, avec eux tellement.
Je raconterai aux petites-filles comment c’était, pas si différent en somme.
Je leur dirai surtout qu’il reste dans les murs de notre maison tout ce que j’ai aimé, tout ce que j’aime, tout ce que j’aimerai de mes enfants.
Et plus le temps passe, plus je me rends compte, chaque année, qu’il y a aussi dans mes Carêmes l’empreinte de ceux du passé, avec eux. C’est comme si c’était écrit quelque part. Dans les murs de ma maison sûrement.
Que le meilleur de ce jour s’écrive aussi pour vous, quelque part.
à demain