Il fallait faire attention en attrapant la boîte sur l’étagère. Il fallait faire attention en l’ouvrant. Il fallait faire attention en prenant chacune des décorations de Noël faites de verre, de doré, d’argent et de rouge, toutes enveloppées avec soin dans du papier de soie.
– C’est fragile !
Le mot était dit, l’attention à son comble au moment d’accrocher une boule à l’une des branches du sapin. Il ne s’agissait pas de se louper. On l’avait déjà vue, l’année passée, la superble dorée éclater en mille morceaux sur le sol. Chaque fois que cela arrivait, une vraie tristesse de laisser disparaître ce qui était là depuis presque toujours nous envahissait.
– C’est tellement fragile, tu n’y peux rien, c’est aussi pour ça qu’on achète quelques nouvelles décorations chaque année. Ne t’en fais pas.
Les santons aussi l’étaient, fragiles, comme certaines guirlandes. Il y avait dans les préparatifs de Noël un calme trop sérieux qui permettait que tout se passe bien. Et peu à peu, quand tout prenait forme, une détente, une douceur, une joie s’installaient, quelque chose qui nous disait voilà, c’est réussi.
Je me souviens de cette fragilité-là. D’une autre époque je crois, les décorations de papier, de plastique ou de bois nous l’ont peu à peu fait oublier.
Aujourd’hui, de fragiles, je ne garde que mes santons que j’enveloppe aussi dans du papier de soie, rangés dans un carton où j’ai écrit en lettres majuscules
NOËL FRAGILE
Chaque année, je fais attention en attrapant la boîte sur l’étagère, je fais attention en l’ouvrant, je fais attention en prenant chacun d’eux.
Et c’est ma prière.
Ma prière pour toutes les fragilités de la terre.
Je retrouve ce calme trop sérieux en installant chacun d’eux, doucement, dans ma crèche et j’espère, juste après, une détente, une douceur et une joie qui disent que tout est possible.
à demain

