Jour 17
Je me souviens de ces petits ateliers de bricolage sur la table de la cuisine. Il fallait un papier un peu épais, une feuille Canson faisait l’affaire. On la peignait d’abord des couleurs du vent. Mais dis c’est de quelle couleur le vent ? Souvent on étalait des bleus du clair au plus foncé, peut-être que le vent est de la couleur du ciel et de l’océan dans ce mélange de ce qui fait nos vies. Un peu de colle, un peu de temps, une attache parisienne – j’aimais bien dire attache parisienne – ça lui donnait un air un peu chic à ce petit morceau de fer de rien du tout – et un bâton. Il nous fallait un bâton, fin mais solide qui supporterait les assauts du vent sans se rompre. Il nous préparait souvent les plus petits des morceaux de bambous, ceux qu’il avait un jour plantés au fond du jardin et qui donnait au vent du large un air presque exotique.
Et on attachait nos moulins à vent au bout de nos mains.
Je me suis rappelée mes moulins à vent enfouis dans ma mémoire en leur citant Don Quichotte ce matin-là, début d’Avent, c’était le troisième jour je crois.
– ça a un rapport Madame avec les petits moulins qu’on faisait tourner dans les fêtes foraines ?
Et les voilà partis, ces grands de 14-15 ans, à parler moulins multicolores, fêtes foraines et senteur de barbe à papa. Même pas pour digresser. On était même en plein dans le sujet.
– c’est vrai que c’est étrange les souvenirs, ça revient avec des mots, des images, des odeurs…
Fin du grand chapitre sur l’autobiographie. Avec des petits moulins à vent.
J’ai souri en sortant de ce cours. Je tenais peut-être un bout de mon Avent. Ouf… ce ne serait pas si difficile.
Et la matinée a passé.
Je ne vais quand même pas raconter des moulins à vent, c’est joli mais y a pas une once d’Avent dans ce souvenir et ce morceau de partage avec des collégiens. Tant pis. On verra ce soir.
Et les soirs ont passé.
L’abbaye ce mardi après-midi de pause. Jour 17. Pas de vent à l’horizon.
Profiter de la boutique pour quelques jolies cartes à envoyer pour Noël. Et puis, j’aurais bien le temps de voir si un Frère est dispo, il en est un qui est prêtre, qui me connaît bien et avec qui le pardon est toujours une belle aventure à demander, un trésor à recevoir.
Mes cartes en main, il était là. Et disponible.
Il y avait une jolie conversation sur les pardons. Je n’ai gardé que ce morceau-là pour mon jour 17.
” Mais tu sais, les pardons parfois c’est un peu comme ces moulins à vent qui facilement et sans relâche tournent et tournent quand le grand Vent est là. On a l’impression de tout pouvoir balayer sur notre passage à coups de pardons donnés bien vite, on se dit que ce sera bien plus facile ensuite. Mais est-ce vrai ?
Souffles ténus, petites brises presque invisibles, ils sont plus compliqués lorsqu’ils reviennent presque en catimini. C’est pourtant là qu’il faut tendre l’oreille, pour oser vraiment les donner. Pour le recevoir aussi, parfois discrètement. C’est plus difficile parce qu’il faut s’arrêter. C’est toujours difficile de s’arrêter pour écouter Dieu dans ce qu’Il ose nous dire de plus dérangeant ou de plus secret. On préfère les grands élans de nos vies qui font du bruit et qui n’écoutent pas vraiment.”
Quand il a dit moulin à vent, je n’ai pas pu empêcher un grand sourire. C’était sérieux pourtant.
Alors je lui ai raconté, après.
Les moulins d’enfant.
Ceux de mes élèves.
Et mes petits vents d’Avent.
Il n’y avait pas vraiment de rapport mais comme une boucle qui se fermait entre le début de l’Avent et sa presque fin et je trouvais ça joli.
À son tour, il a souri.
” Si… je crois bien qu’il y a un rapport entre le début de l’Avent et aujourd’hui. Il y a eu l’élan et puis le chemin et puis quelques arrêts. C’est toujours difficile mais c’est une belle chance de s’arrêter pour écouter Dieu. C’est une chance parce qu’Il nous entend. Sois sûre de cela: Il t’entend. Bon vent, bonne fin d’Avent Corine.”
Jour 17. Sois sûre de cela: Il t’entend.
Waouh.
Il y a des jours Seigneur où je me demande comment on peut se passer de Toi.
Et je vous encourage, dans ces jours avant Noël à recevoir le Pardon de Dieu. Il est paix, un peu seulement parfois, mais paix et c’est déjà Tout.
Oh… et puis, soyez sûrs de cela: Il vous entend. 🙂
De l’autre coté de Bellefontaine… là ou le Vent souffle.
J’aime vraiment le chemin de ce billet !! Merci Corine!!
un peu tordu peut-être Marie… 😉
Pas tant pour arriiver là où tu arrives 😉