Dieu doit aimer ces petits dimanches qui flirtent avec la joie, l’embrassent tendrement et la font danser au fil des heures.
Le soleil a frappé au carreau, tôt. J’ai descendu quatre à quatre les escaliers d’un matin de dimanche que j’aimais déjà avant qu’il ne commence. La cuisine, la table à dresser, la famille, la messe et l’ami. Il y a des jours où les mots qui donnent du bonheur au quotidien s’enchaînent sans trébucher. C’est étrange, il y a des jours où c’est le contraire, les maux se déchaînent. La vie c’est vrai, de rose et de gris, toujours.
Mais ce dimanche, c’était du joli, je l’ai senti dès le café tranquille, siroté à la porte qui ouvre vers le jardin. Le doux aussi, je l’ai attrapé pour le poser sur ma table du déjeuner, au creux des belles assiettes, entre les verres qui danseront un peu en se frôlant, puis dans la cocotte qui se préparait à mijoter, qui réservait encore ses saveurs, et même sur le rose de mes joues dans le miroir. Il est des matins où la joie me rend un peu plus jolie je crois.
Le soleil a continué à me faire de l’œil. Avant la porte de l’église, Jehane a partagé avec moi le début d’un Notre Père dans sa langue, fière de mes premiers mots en arabe que j’arrive enfin à retenir. La musique nous a invités à entrer.
Les confirmands de la paroisse accueillis aujourd’hui sont là, les jeunes musiciens mettent déjà un feu de joie et je croise leurs regards: quelques-uns de mes élèves. On se salue, ça fait du bien de les voir ces quatre-là. On se raconte un peu ces drôles de vacances encore. Et S. qui m’arrête un instant encore avant son “à bientôt”… “Madame, la confirmation vous savez, ça va bien comme suite, comme chemin… après Martigné où vous nous aviez emmenés en 5è.”
Des mots comme un merci. Tout revient en mémoire. Plein soleil.
Le soleil, jeu des vitraux, se pose souvent en un rayon complice sur l’autel, juste à ce moment-là. Berger. Je revois un instant celui rencontré dans les Pyrénées, un soir de randonnée. “Un berger, c’est un peu comme un passeur. Il montre le chemin, il fait simplement passer du bon côté.” J’écoute mon pasteur-passeur. Il est des mots qui aiment jouer ensemble. Soleil brûlant.
Le soleil, à la maison, dans les regards, dans les mots, dans les rires. L’amitié doit avoir une place quelque part à côté des premiers soleils du printemps Elle a la douceur de ses rayons qui osent s’attarder un peu, elle réchauffe sans jamais brûler, elle anime, elle fait vivre, elle est toujours là.
On savoure et le repas et la vie et le temps. Et l’avenir qu’on dessine aussi avec ma grande fille qui fait résonner le mot mariage l’espace d’un appel téléphonique. Soleil écran total.
Le soir l’efface du ciel, doucement. Le soleil disparaît, lentement. Et la joie demeure.
Simple, sans folie, sans excès. Mais elle remplit mon espace et me répète que la vie, comme elle est, me donne envie de l’aimer. D’aimer.
Demain, je vais retrouver le chemin du collège, avec mes collègues, sans élèves mais ils seront là bientôt.
Demain, je vais croiser Isabelle, mon amie infirmière qui me racontera ses heures difficiles.
Et viendront les amis de la paroisse, les voisins, la famille, les amis,
et tous ceux que je connais bien, ceux que je connais moins, ceux que je connais pas encore.
Et je sais que dans chacune de mes rencontres la joie sera là. Ni naïve ni mièvre mais profonde, presque sérieuse même, oui, sérieuse de savoir qu’elle ne vient pas de moi, qu’elle est bien plus grande encore.
C’est Sa Lumière qui donne de l’éclat à ma vie. Profondément.
Ce soleil, celui que Dieu doit aimer pour que ces petits dimanches flirtent avec la joie, l’embrassent tendrement et la font danser au fil des heures.
De la joie, ce presque rien.