Il est des gris qu’on aimerait effacer d’un tour de main. Les gris du monde, ceux de nos vies, ceux de nos cœurs aussi. On aimerait sans doute le coup de baguette magique d’un Dieu qui contenterait d’un coup d’un seul toutes nos petites prières. On Le voudrait là, enfin, à faire sa loi, à imposer son amour, à faire taire le mal d’où qu’il vienne. Oui, il est des gris qu’on aimerait qu’Il repeigne une fois pour toute en un joli coup de pinceau.
Pourtant, oui, pourtant, j’ai beau prier, rien ne change vraiment.
Pourtant, oui, pourtant. Je lève les yeux, je regarde ma rue, mon village, mon pays et au-delà tous ceux que je connais même un peu loin, et si je regarde bien, je vois dans les gris du monde des petits fils argentés. De ceux qui tissent des gestes de paix, de partage, de beau. Et l’espace d’un instant, les gris prennent, à force d’humanité, une couleur brillante comme l’espoir.
Pourtant, oui, pourtant. Je lève les yeux, au-delà du passé, un peu loin du présent, et si je regarde bien, je vois dans les gris de quelques souvenirs des petits fils argentés. De ces mains tendues, de ces sourires donnés, de ces moments partagés. De ceux qui tissent l’ordinaire d’une vie plutôt jolie. Et l’espace d’un instant, les gris prennent, à force d’humilité, une couleur qui brille comme l’amour.
Pourtant, oui, pourtant. Je lève les yeux, au-dessus des pages d’une Bible, au bord de quelques psaumes, dans un coin d’évangile et si je regarde bien, je lis dans les gris de Joseph, les cris de Job, les souffrances de David la confiance, infaillibles cœurs qui jamais ne lâchent. Et l’espace de Sa Parole, lue et relue, les gris prennent, à force de mots, une couleur qui brille d’Espérance.
Il est des gris qu’on aimerait effacer d’un tour de main.
Peut-être bien qu’après-demain, on sera tenté, juste en sortant de l’église, de ne pas trop la montrer notre petite croix de cendres, traits de gris sur nos fronts dessinés. Peut-être bien qu’on ferait pâles figures à expliquer ce qui n’est plus connu, ce qui n’est pas compris. Peut-être.
Au fond, peu importe.
Il sera là, sur ma peau, ce gris. Il me redira la poussière de notre monde, de nos vies, de la mienne. Mais il me dira aussi, bien davantage, que la cendre peut enrichir la terre, nettoyer les vitres même et d’elle, faire naître la vie et la lumière.
Du gris terne au gris argenté, c’est de cela dont je viendrai vous parler un peu, au long de ce nouveau Carême, ici ou là, tout près ou bien loin, chaque jour ou presque.
Bien regarder les petits fils argentés qui colorent l’espace de notre monde, de nos vies, de nos cœurs. Parce qu’ils existent, en vrai.
Merci Corine
Heureuse de te retrouver pour ce Carême.
🙂