Uppercut au coeur

Il y a ces heures de caté qui me laissent K.O.
Non pas qu’elles me cassent, me lassent, me dépassent non. Non.
Mais elles sont comme un uppercut donné en plein cœur. 

 

Ça a commencé un peu drôlement ce vendredi d’abord parce qu’on s’est donné des nouvelles du garçon qui inscrit depuis le début de l’année ne peut pas participer au caté. Une leucémie l’empêche d’être un collégien de 5ème exactement comme les autres. Alors on s’est redonné de ses nouvelles oui et puis on a parlé de la maladie. 
La mort aussi.
Les souffrances. Les maux. Les douleurs.
Ils voulaient depuis longtemps que ce soit notre thème.

J’avoue, il y a un mois, puis encore il y a 15 jours, avoir repoussé ce temps-là en leur parlant d’autre chose. 
– Mais madame, on en parle quand de la mort et tout ?

 

Je ne pouvais pas repousser davantage.
Et tout, c’est cela. Ils voulaient parler de tout ce qu’ils ne comprennent pas.
 
Il y a ces heures de caté qui me me laissent K.O.
Voilà. Ils voulaient parler de “ça”. J’ai sorti Job hier soir. J’ai relu quelques pages. Chercher celles qu’ils pourraient comprendre, celles qui pourraient m’aider à leur donner, à eux, la parole.
Ça tombait plutôt bien qu’il soit là, dimanche prochain.

Alors, aujourd’hui, je leur ai dit son histoire. Je leur ai lu ses cris. 
Il y avait du silence. Vous savez, ou peut-être pas, oui peut-être que vous ne savez pas, mais il y a parfois leurs silences d’à peine 13 ans qui en disent long.

Et il y a eu leurs mots.
Sur un papy pas si vieux et ses trois cancers.
Sur une amie de maman.
Sur une jeune tante.
Et il y a eu ses yeux si présents à chercher les miens.
Sur sa maman disparue.
Et il y a eu mes mots.

J’ai, pour la première fois, dit merci à ce maudit masque qui bien remonté jusqu’au bord de nos yeux a su cacher l’indiscrétion de nos peines.

 

Notre petite prière s’est faite tout petite. La sonnerie qu’on avait même pas vu venir ne l’a pas dérangée. Ils sont restés là, un peu après l’heure. 
– Il faut désinfecter nos tables madame.
Ils sont restés là à nettoyer encore. 
Souvent le quotidien et ses gestes nous aident à retrouver la vie.

– C’est moche le virus madame mais les masques des fois, ça cache pas que nos sourires hein ! … et bon week-end madame ! Oui bon week-end !

Elle a fait marche arrière.

– C’était bien, vraiment bien.

Est repartie très vite.

 

Uppercut en plein cœur. Merci Seigneur.

On a commencé comme ça notre bout de chemin, sous un veux chêne…

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