Espérer

 

Le cercueil entouré de fleurs faisait face à l’Espérance affichée en toutes lettres au bord de l’autel.
L’arrière petite-fille babillait ses questions.
Le soleil filtrait à travers les vitraux.
Sa famille, ses amis, ses voisins étaient là.

On a dit au-revoir à la grand-mère de notre gendre hier.
Chaque départ est une tristesse. Une maman, une mamie, une amie qui nous quitte emporte nos larmes.
Si le vieil âge rend la mort souvent un peu plus douce, rien n’adoucit la peine de ce qui ne sera plus.

La vie continue d’espérer la Vie. C’est, chaque jour, ma petite prière de Carême.

 

Que ce Carême qui continue soit pour vous aussi source d’Espérance.

à demain

Dans les murs

Il a fallu vider les trois chambres des enfants, enfin plus exactement il a fallu trier les objets. Ils avaient déjà, plus ou moins selon chacun, emporté un peu de leur enfance au fil des ans, puis de leur adolescence et de leurs week-end étudiants. Il restait encore des livres, des photos, des bricoles, beaucoup de bricoles oui, tous ces petits trucs qu’on garde dans les tiroirs et qui ne servent à rien seulement qu’à se souvenir.

Et puis, on a refait les sols, les peintures, un peu de tapisserie, c’est joli. Enfin, Caroline surtout. C’était doux de voir cette formidable artisane s’emparer de l’espace avec beaucoup de talent et de joie. Elle m’a laissé le temps de raconter des bouts d’histoire. C’était bien. On va changer les rideaux, se réapproprier les lieux. Mais cette chambre sera pour eux quand ils viendront, celle-ci pour les petites-filles et celle-là, oui, bien sûr ils l’utiliseront aussi s’ils restent tous pendant des vacances, un samedi soir. Cela aussi a fait sourire Caroline quand je continuais à lui indiquer la chambre de notre grande, celle de notre fils et celle de notre plus jeune. “Vous avez gardé leurs prénoms comme accrochés à leurs portes.”

Il a fallu vider les trois chambres de leur enfance mais j’ai tout gardé oui. En moi, au cœur. Je crois que ça me fait du bien aussi pour vieillir de laisser aller un peu le temps qui passe, de le laisser partir. Je me réapproprie l’espace sans eux tout le temps, avec eux autrement, avec eux tellement.

Je raconterai aux petites-filles comment c’était, pas si différent en somme.

Je leur dirai surtout qu’il reste dans les murs de notre maison tout ce que j’ai aimé, tout ce que j’aime, tout ce que j’aimerai de mes enfants.

 

Et plus le temps passe, plus je me rends compte, chaque année, qu’il y a aussi dans mes Carêmes l’empreinte de ceux du passé, avec eux. C’est comme si c’était écrit quelque part. Dans les murs de ma maison sûrement.

 

Que le meilleur de ce jour s’écrive aussi pour vous, quelque part.

à demain

 

 

 

Des allers-retours

 

Ce sont toujours des petits voyages d’amour, des allers-retours vers une douceur infinie, vers des sourires à n’en plus finir, vers des élans de tendresse qu’on ne supposait même pas.

Ce sont des voyages comme on aimerait les garder durant tout le reste de nos vies. Simples, vrais, solides. Ce sont toujours des moments précieux.

Retrouver mes petites-filles, en Bretagne comme ce week-end ou dans un coin d’une très jolie campagne, a ce je ne sais quoi de vivant, de plus que vivant, ce petit espace d’espérance en la vie qui continue.

J’y retrouve, à chaque fois, tout l’amour qu’un petit-enfant sait donner sans retenue.

Parfois, je me dis que ça doit ressembler à ça l’amour de Dieu pour chacun d’entre nous: des allers-retours de douceur, sans cesse, simples, vrais, solides.
Et d’une douceur infinie.

 

Je vous souhaite une semaine faite de nombreux allers-retours de douceur,

à demain

    Photo @AnSoF
https://danslalumiere.wordpress.com/

Prière

 

Je ne sais pas très bien faire ma petite prière.
Ni celle du soir, ni celle du matin d’ailleurs. J’ai bien appris pourtant.
Le silence, les mercis, les pardons, les s’il te plaît.
Le chemin qui prend du temps pour aller jusqu’au fond de son cœur, les mains qu’on rapproche, les paupières qui se ferment. Mais je ne sais pas très bien cette petite prière-là. Je crois même que je fais un peu semblant quand j’essaie.
Peut-être que c’est à cause du verbe faire, peut-être qu’elle ne me ressemble pas. Parce que, pour vous dire la vérité, ma petite prière, je n’ai pas vraiment l’impression de la faire.

Je la touche des doigts lorsque je caresse les pages de mes livres.
Je la sens sur ma peau quand le vent trop fort fait frissonner mon matin.
Je l’entends dans les bonjours amis et les bons mots d’enfants.
J’y goûte même sur les crêpes dorées à la fin des journées, dans les pots de confiture où je laisse traîner la cuillère.
Je la regarde dans les blessures et les sourires autour.

C’est pas de la poésie à deux balles non. Ma petite prière, je ne la fais pas.
Peut-être bien parce que je Le sais là, tout à côté, très près, pas loin, à bien vouloir me donner la main. Tout le temps.
C’est ça oui et ma petite prière, elle est là quand moi aussi je veux bien attraper La sienne.

Bon deuxième dimanche, dans ma petite prière 🙂

à lundi

Petites notes

C’est presqu’une overdose de mots à chaque fois: il faut trouver l’adjectif le plus juste, la bonne dose entre l’encouragement et les conseils, les remarques pour progresser sans se mentir, les mots qui ne blesseront pas.
C’est difficile parce que l’enjeu est là: en très peu de mots, signifier à chacun de mes élèves ce que je mesure de son travail, de son attitude, de ses progrès. Ce que je peux lui donner comme conseils.

Et toujours chercher les mots qui pourraient faire grandir.

Je ne crois pas qu’en plus de 35 ans de métier, j’y arrive à chaque fois. Loin de là. Ce que je sais en revanche, c’est que remplir les bulletins de mes élèves me vident, au sens littéral du verbe. Je cherche en moi ce qu’il y a de plus juste à leur dire. Et je peux vous assurer qu’en un nombre de signes imposés, c’est assez physique.

 

Alors, voilà, j’aime assez que mes deux premiers trimestres correspondent à chaque fois à mon Avent et à mon Carême ou, du moins, à un bon bout d’entre eux. Parce que c’est bien là que je viens chercher, au creux de mes petites prières,  les mots qui me manquent, corriger ceux qui se voudraient injustes, effacer ceux qui seraient de trop, ajuster mes petites notes griffonnées sur chacun au fil des jours.

À l’heure où j’écris, je clôture ma dernière classe et, un peu fatiguée, je vais les confier, tous, chacun d’entre eux, à Dieu.

Ils ne le savent pas. Jamais, je ne leur dis. Ils ne le sauront jamais.

C’est la douceur de ma Foi de croire que Dieu m’entend et qu’Il est là pour tous, pour chacun d’entre eux, et un peu dans mes mots.

à demain

Simplement

 

J’aimerais parfois retrouver la simplicité du tout petit enfant.
Celle qui n’a pas peur d’oser sans même bien savoir ou même sans savoir du tout.

Comme ma toute Petite-fille qui découvre les crayons et leur possible, laisse filer le feutre sur la page, croise les lignes sans vraiment attendre de résultats et s’émerveille de ça.
Il y a des traces de raté plein les petits doigts et c’est plutôt joli.

 

J’aimerais parfois que mes prières de Carême ressemblent à ça, qu’elles osent sans même bien savoir, laissent filer mes mercis sans rien attendre en retour et sachent encore s’émerveiller du beau, des petits riens, de la vie simplement.
Il y aura des ratés évidemment, des pardons à murmurer et ce sera simple.

 

à demain 😉

 

 

 

On accroche

On accroche des petites phrases à leur cœur au début de chaque journée, on essaie du moins. Chaque matin, depuis lundi, on s’est dit que ce serait bon pendant quatre semaines au collège, jusqu’aux prochaines vacances, de laisser des mots simples, des mots doux, des mots de joie, des mots qui font réfléchir.
On accroche des petites phrases à leur cœur de collégien: il y en a qui les reçoivent, d’autres sur qui ça doit glisser, et il y a ceux qui ne recevront rien du tout parce que leur cœur est bien trop encombré pour faire une petite place à quelques mots en cadeau.
On accroche des petites phrases en salle des profs aussi, les mêmes, parce qu’on s’est dit que ça ne ferait pas de mal de lire du bon, du bien, du bien oui, du bien on espère; on les accroche aussi à l’entrée du collège pour ceux qui passent, ceux qui entrent, ceux qui viennent là.

On accroche. Vous savez comme un peu d’amour suspendu qui ne demande qu’à être attrapé si on veut, si on peut.

On approche, c’est presque pareil vous voyez.

On approche des bouts d’amour comme des bouts de Dieu tout près d’eux en leur disant des mots juste pour eux. Juste ça.
On approche, on s’approche. On voudrait bien entrer dans leurs cœurs mais non. C’est comme Dieu. Il s’approche, se fait proche, accroche des mots à nos vies, nous parle, nous retient parfois.
Mais il ne force pas les cœurs.

Une joie, cette liberté.

On accroche des petites phrases à leur vie chaque jour. Libre, libre à eux de les entendre, de les garder, de les oublier.

Une joie, ces petits partages.

 

à demain

Des manques

Il y avait une place à côté d’elle, je n’ai pas hésité. Il faut dire que je ne suis pas arrivée très tôt et l’église était déjà bien remplie. Elle l’est dans ma paroisse la plupart des dimanches. Et en plus de ça, dimanche, il y avait un temps d’accueil des futurs communiants et de leur famille, alors oui, l’église était déjà bien pleine.

Elle m’a attrapé le bras droit en m’embrassant la joue comme pour me retenir avant que je ne m’assoie et me souffler à l’oreille.
“La réunion pour la préparation de la messe de quartier c’est mercredi et c’est chez moi. Oui, tu sais maintenant, on fait ça chez nous chacune notre tour, c’est plus chaleureux. Je serai heureuse que tu viennes.”

Parce que je ne viens plus depuis un an.
Il y a eu un trop-plein, de la fatigue, le besoin de faire quelques choix.
Ce n’était pas facile ces choix-là mais je crois que cela m’a fait du bien.
Je ne viens plus donc, je leur ai dit bien sûr aux filles que je reviendrai peut-être.

“Tu nous manques.”

Elle a terminé avec son sourire. Il n’y avait pas de flatterie, pas l’intention de me forcer non plus à revenir trop vite, aucune manœuvre. Juste l’invitation et le cœur qui va avec.

Cela m’a fait du bien d’avoir du temps pour autre chose,  du temps pour rien aussi.

Mais aujourd’hui, j’ai hâte. J’ai hâte d’y être. Mercredi, au creux de mon après-midi. J’ai hâte de les retrouver non pas parce qu’elle m’a dit que je leur manquais mais parce qu’en l’entendant, j’ai soudain moi aussi ressenti le manque d’elles, de ces partages, de ces deux heures à creuser la Bible pour mieux la comprendre, au-delà du bien que la pause de quelques mois m’a procuré.

Oui, ce sont elles, mes sœurs de paroisse, et leurs partages, qui me manquent bien davantage, encore, à nouveau.

Et je me dis que le Carême, c’est un peu ça aussi.
Ressentir, à chaque fois, vraiment oui à chaque fois, combien je me suis, mine de rien, éloignée doucement happée ailleurs, et combien le manque de Dieu et des autres se fait grand. Ressentir qu’Il me manque et avoir tout plein d’amour à combler, à remplir, c’est bon aussi ce sentiment.

Je vous souhaite de ressentir parfois ce manque de Lui pour savoir combien il est bon de Le savoir là.

Bon jour,  et à demain.

 

Des matins

Je crois que j’aime bien les matins. Vraiment bien. Depuis toujours, ils ont les possibles que les soirs, tout emmêlés des journées, n’ont pas.
Ils ont le goût de l’espoir, celui du jour qui recommence.
Ils font le bruit des “on verra bien”, ceux qui nous déplacent enfin.
Ils sentent bon les parfums des petits riens à vivre, ceux qui feront invariablement les belles choses.

Je crois que les matins existent pour qu’on espère. Et c’est au creux du silence d’une maison endormie, accompagnée parfois des premières notes des oiseaux, que je prie pour le monde lui demandant à chaque fois de se réveiller du bon pied. Il est des jours où je ne suis pas déçue vous savez. Il suffit de bien y regarder à deux fois mais il est des raisons d’espérer.

Je crois que j’aime bien les matins. Peut-être parce qu’ils me ressemblent un peu plus que mes soirs. Ils gardent en leur commencement l’audace d’oser croire que le jour nouveau sera doux.

Bon matin, puissiez-vous vivre un bon jour,

à demain.

 

Prière du matin

 

Se lever chaque matin,
ouvrir sa porte,
ses fenêtres,

regarder le ciel,
respirer l’espace,
entendre les musiques de l’aube,
écouter les silences,
goûter à tous ces instants offerts en partage
et se dire qu’il est temps de vivre

Se permettre d’être vivant

Dans Sa Lumière

 

Bon premier dimanche de Carême !