Comme la paille balayée par le vent

Jour 14

17h05 a sonné. Vendredi soir. On s’est posés trois minutes dans la salle des profs et on a dit ouf. Ouf à une des périodes sans doute les plus denses de l’année entre les conseils de classe, les rencontres avec tous les parents, les appréciations de bulletins et surtout la gestion du quotidien. Les punitions, celles dont on se passerait bien mais qu’on ne peut pas laissé passer.
Le respect. De soi. Des autres. De tous. Mon leitmotiv, le nôtre, celle d’une équipe, dans mon petit collège de campagne. Touché, touché aussi, me dit-on parfois, touché par ces mains qui blessent, ces regards qui jugent, ces mots qui insultent. On aimerait qu’il en soit autrement parce qu’à la campagne quand même, c’est pas la banlieue. Non, bien sûr. En est-il autrement pourtant sur une cour de récré, dans les couloirs d’un collège, entre les bureaux des classes ? Blessures, jugements, insultes. On en oublierait presque les fous-rires, les parties de foot endiablées, les tapes amicales sur l’épaule. Les jolis mots.

17h05 a sonné. Vendredi soir. On s’est dit à lundi pour la dernière semaine avant Noël. Enfin Noël. On va le souffler ce petit vent dans le collège la semaine prochaine. On accrochera quelques guirlandes aux fenêtres lundi, notre cuistot leur prépare des surprises pour leurs midis de cantine, elle leur montrera les Noëls d’ailleurs, il dessinera des cartes de vœux avec eux, on lira les Noëls des écrivains, on se regardera notre premier film au ciné-club du collège, on ira à la célé de Noël, nombreux. Et on chantera tous. Ensemble.

Vent de Noël. Il n’y a pas de naïveté, non. Les mains qui blessent, les regards qui jugent, les mots qui insultent ne seront pas balayés d’un seul revers de jolis moments.
Pourtant, je le sais. Un vent comme une envie d’être mieux ensemble soufflera. Nous le soufflerons aussi.

Les chemins difficiles, les paroles mauvaises, les regards méchants ne seront pas comme la paille résolument balayés par le vent de Noël. Un instant, on fera un peu plus de place au verbe aimer, à son Verbe peut-être. Sans fioritures, sans guimauves dégoulinantes de bons sentiments, sans faux-semblants.
17h05 a sonné. Un vendredi soir qui espère et qui rend possible Noël dans un tout petit collège, à la campagne.

Noël sera là. Comme toujours.

Jour 14
Donne-nous Seigneur de marcher vers Toi chaque jour. De poser la Lumière de Noël dans chacune de nos heures. De ne pas attendre Noël pour aimer.

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