On accroche

On accroche des petites phrases à leur cœur au début de chaque journée, on essaie du moins. Chaque matin, depuis lundi, on s’est dit que ce serait bon pendant quatre semaines au collège, jusqu’aux prochaines vacances, de laisser des mots simples, des mots doux, des mots de joie, des mots qui font réfléchir.
On accroche des petites phrases à leur cœur de collégien: il y en a qui les reçoivent, d’autres sur qui ça doit glisser, et il y a ceux qui ne recevront rien du tout parce que leur cœur est bien trop encombré pour faire une petite place à quelques mots en cadeau.
On accroche des petites phrases en salle des profs aussi, les mêmes, parce qu’on s’est dit que ça ne ferait pas de mal de lire du bon, du bien, du bien oui, du bien on espère; on les accroche aussi à l’entrée du collège pour ceux qui passent, ceux qui entrent, ceux qui viennent là.

On accroche. Vous savez comme un peu d’amour suspendu qui ne demande qu’à être attrapé si on veut, si on peut.

On approche, c’est presque pareil vous voyez.

On approche des bouts d’amour comme des bouts de Dieu tout près d’eux en leur disant des mots juste pour eux. Juste ça.
On approche, on s’approche. On voudrait bien entrer dans leurs cœurs mais non. C’est comme Dieu. Il s’approche, se fait proche, accroche des mots à nos vies, nous parle, nous retient parfois.
Mais il ne force pas les cœurs.

Une joie, cette liberté.

On accroche des petites phrases à leur vie chaque jour. Libre, libre à eux de les entendre, de les garder, de les oublier.

Une joie, ces petits partages.

 

à demain

Des manques

Il y avait une place à côté d’elle, je n’ai pas hésité. Il faut dire que je ne suis pas arrivée très tôt et l’église était déjà bien remplie. Elle l’est dans ma paroisse la plupart des dimanches. Et en plus de ça, dimanche, il y avait un temps d’accueil des futurs communiants et de leur famille, alors oui, l’église était déjà bien pleine.

Elle m’a attrapé le bras droit en m’embrassant la joue comme pour me retenir avant que je ne m’assoie et me souffler à l’oreille.
“La réunion pour la préparation de la messe de quartier c’est mercredi et c’est chez moi. Oui, tu sais maintenant, on fait ça chez nous chacune notre tour, c’est plus chaleureux. Je serai heureuse que tu viennes.”

Parce que je ne viens plus depuis un an.
Il y a eu un trop-plein, de la fatigue, le besoin de faire quelques choix.
Ce n’était pas facile ces choix-là mais je crois que cela m’a fait du bien.
Je ne viens plus donc, je leur ai dit bien sûr aux filles que je reviendrai peut-être.

“Tu nous manques.”

Elle a terminé avec son sourire. Il n’y avait pas de flatterie, pas l’intention de me forcer non plus à revenir trop vite, aucune manœuvre. Juste l’invitation et le cœur qui va avec.

Cela m’a fait du bien d’avoir du temps pour autre chose,  du temps pour rien aussi.

Mais aujourd’hui, j’ai hâte. J’ai hâte d’y être. Mercredi, au creux de mon après-midi. J’ai hâte de les retrouver non pas parce qu’elle m’a dit que je leur manquais mais parce qu’en l’entendant, j’ai soudain moi aussi ressenti le manque d’elles, de ces partages, de ces deux heures à creuser la Bible pour mieux la comprendre, au-delà du bien que la pause de quelques mois m’a procuré.

Oui, ce sont elles, mes sœurs de paroisse, et leurs partages, qui me manquent bien davantage, encore, à nouveau.

Et je me dis que le Carême, c’est un peu ça aussi.
Ressentir, à chaque fois, vraiment oui à chaque fois, combien je me suis, mine de rien, éloignée doucement happée ailleurs, et combien le manque de Dieu et des autres se fait grand. Ressentir qu’Il me manque et avoir tout plein d’amour à combler, à remplir, c’est bon aussi ce sentiment.

Je vous souhaite de ressentir parfois ce manque de Lui pour savoir combien il est bon de Le savoir là.

Bon jour,  et à demain.

 

Des matins

Je crois que j’aime bien les matins. Vraiment bien. Depuis toujours, ils ont les possibles que les soirs, tout emmêlés des journées, n’ont pas.
Ils ont le goût de l’espoir, celui du jour qui recommence.
Ils font le bruit des “on verra bien”, ceux qui nous déplacent enfin.
Ils sentent bon les parfums des petits riens à vivre, ceux qui feront invariablement les belles choses.

Je crois que les matins existent pour qu’on espère. Et c’est au creux du silence d’une maison endormie, accompagnée parfois des premières notes des oiseaux, que je prie pour le monde lui demandant à chaque fois de se réveiller du bon pied. Il est des jours où je ne suis pas déçue vous savez. Il suffit de bien y regarder à deux fois mais il est des raisons d’espérer.

Je crois que j’aime bien les matins. Peut-être parce qu’ils me ressemblent un peu plus que mes soirs. Ils gardent en leur commencement l’audace d’oser croire que le jour nouveau sera doux.

Bon matin, puissiez-vous vivre un bon jour,

à demain.

 

Prière du matin

 

Se lever chaque matin,
ouvrir sa porte,
ses fenêtres,

regarder le ciel,
respirer l’espace,
entendre les musiques de l’aube,
écouter les silences,
goûter à tous ces instants offerts en partage
et se dire qu’il est temps de vivre

Se permettre d’être vivant

Dans Sa Lumière

 

Bon premier dimanche de Carême !

 

Cahier d’amour

Venir ici, c’est essayer, pendant 40 jours, de vous donner à voir –  à lire – des jolis instants de prières, de partages, des jolis instants avec Dieu et avec les autres. Parce que je crois intimement que se préparer à Pâques ne peut être fait que de partages joyeux, riches d’amour.

Ces partages de joies, petites ou grandes, seront posés là. Dieu, c’est ce qu’Il met dans ma vie depuis toujours, sur mon chemin depuis longtemps, pour me dire qu’Il est là. C’est ce qu’Il ose déposer à mes pieds pour que je puisse avancer dans ce monde.
Ici, ça a commencé avant-hier par une communauté rassemblée pour recevoir les Cendres, d’un tout petit enfant juste né dans les bras de sa mère au vieil ami qui ne peut presque plus marcher. Et c’était empli de joie véritable.

Et ça continue.
Nouvel instant.

Depuis la rentrée des classes, il y a dans mes jeudis, dans chacun de mes jeudis de classe, coincée entre le français de mes sixièmes et le latin de mes grands collégiens, une grosse heure précieuse. Vous savez comme un rendez-vous qui revient et qu’on attend ou qu’on attend parce qu’on est heureux qu’il revienne.

Depuis la rentrée des classes, j’ai repris un petit groupe de catéchèse en école primaire, comme du temps où j’étais maman d’enfants de primaire.
Ils sont 7, ils ont 8 ans, ils sont inscrits au caté, ils ne vont pas à la messe ou très peu, ils ne parlent pas beaucoup de Dieu à la maison, ils s’excusent souvent de ne pas avoir fait leur activité-maison, ils ont choisi de faire du caté sans , il me semble, qu’on leur impose, peut-être parce qu’ils avaient envie. Ils sont simplement des enfants d’aujourd’hui.

Et je les trouve passionnants.
Parce que, vous savez, au cœur de chacun, je découvre qu’il y a ce petit espace qui cherche, qui doute, qui croit.

Et je les trouve immensément chercheurs, curieux, confiants.
Inutile de vous préciser que depuis six mois, je grandis encore – sans prendre de la hauteur pour autant. 😉
Je grandis grâce à eux.

Ce jeudi, on s’est raconté Dieu qui nous écoute dans la prière.
Charline a osé : “On prie comme on peut, Jésus comprend.”
Théo a partagé: “Je ne sais pas prier, enfin pas bien, alors je parle tout bas à Jésus dans ma chambre le soir, tu crois que ça marche comme prière ça, Corine ?”
Amaël a murmuré: ” Je ne sais pas prier, ça me stresse de parler à Dieu alors je me tais et des fois, le soir, je pense dans ma tête…Oui, je crois que Dieu, bah… Il entend ma tête.”

Chaque semaine, je note leurs phrases.

Ils ont déjà écrit un gros cahier d’amour.

Ne pas être à la hauteur

 

Il y a toujours ce temps, lorsque je pars randonner, où je suis partagée entre la grande forme des commencements – la tête est heureuse, le cœur aussi, les jambes sont alertes, les pieds ne font pas mal – et la perspective des kilomètres, dénivelés compris, qui risquent – pour moi, c’est une évidence ! – d’attaquer très vite la tête, le cœur et le corps tout entier.
Il y a toujours ce temps au commencement qui donnerait presque le vertige, celui d’un enthousiasme véritable mêlé aux inquiétudes à venir.

C’est drôle parce que j’ai l’impression que je retrouve souvent cet état chez bon nombre de mes élèves, pour la plupart encore très enthousiastes au début d’un projet d’écriture et en même temps, presqu’aussitôt, ils savent me dire leurs inquiétudes, les vertiges à venir de tous les efforts à produire, des difficultés à surmonter et peut-être bien, en tout premier, le sentiment qu’ils ne seront pas à la hauteur des attentes, les leurs bien davantage que les miennes d’ailleurs.

C’est avec ça à l’esprit que je commence mon chemin de Carême: enthousiaste je le suis, tellement le besoin de Te retrouver Seigneur m’envahit tout comme l’envie de partager avec ceux qui m’entourent. Le chemin de Carême est long, 40 jours, ce n’est pas une paille et je suis inquiète de ne pas être, une fois encore, à la hauteur.

Mais  de quelle hauteur je parle ?
Et Toi, à quelle hauteur m’attends-tu ?

 

C’est en rentrant hier soir, dans une pénombre lumineuse, petite croix ancrée sur moi, que je me suis redis combien j’étais bien audacieuse encore, impertinente toujours, d’oser encore jauger, mesurer, compter presque, Ta présence à mes côtés. Vraiment. Toi qui t’abaisses au plus près de chacun et moi qui parle d’être ou de ne pas être à la hauteur ?
J’ai ri de l’effronterie, j’en ris encore en l’écrivant.

Car, c’est bien là, oui, au plus bas, au plus profond de nos cœurs, au plus près de Toi que nous pourrions nous pencher encore pour espérer grandir un peu.

à demain 😉

Un nouveau chemin

Il y a ici, sur ces pages, des chemins qui ne sont pas oubliés. Les bords surtout. Ce qui reste un peu de côté du reste de la vie, un peu à côté du monde qui s’oublie, des petits pas de côtés qui, étonnamment, font avancer.

Il y a eu ici quelques chemins de Carême et aujourd’hui même, l’envie d’y retourner. Je ne sais jamais trop combien de temps ni où ces chemins vont me mener et pour autant, il serait dommage de ne pas commencer à les emprunter.

C’est au soir que l’habitude me mène depuis des années vers la célébration des Cendres. L’habitude. Le mot est lâché. Ne serait-ce devenu qu’une bonne vieille habitude ? Non. Mais non, et puis, ce serait les dénigrer un peu trop vite de toute façon. Parce que je les aime assez les habitudes, vous savez ça vous qui venez encore me lire. 😉

C’est au soir donc que je partirai vers mon église. Le soleil sera encore présent, il se couche un peu plus tard et puis, depuis quelques jours, il ne se cache pas derrière la pluie. Le soleil sera bien là, c’est certain.
C’est au soir que la petite croix sera tracée sur nos fronts. Un filet de poussière, presque rien. Un petit signe pourtant que j’essayerais de garder un peu, un peu plus longtemps. Le signe de Sa présence, là, ici, tout près.
Au milieu d’un temps qui se heurte au temps.
Au milieu des bruits, un peu de doux.
Au milieu des mille et une choses qui peuvent encombrer nos heures, un minuscule espace de silence.
De paix.
D’amour.

C’est au soir mais déjà ce matin, le chemin commence.
J’ai croisé un rayon de lumière posé tout près d’un petit café, j’ai écouté le projet de Caroline qui chantonne dans les chambres des enfants en repeignant les plafonds, j’ai attrapé le sourire d’un franc bonjour, j’ai corrigé trois rédactions qui me redisent pourquoi j’aime tant leur faire découvrir les mots, j’ai ouvert mon vieux blog et posé ces quelques phrases. Il commence bien ce jour.

Ouvrir ce blog comme un nouveau chemin à prendre, je vais tenter encore l’aventure. Pour partager avec vous un peu de prières, un peu des autres, un peu de mon Espérance.

Bon début de chemin !

à demain, oui, à demain.

 

S’habiller de velours

Peut-être qu’on devrait s’habiller de velours, peut-être qu’on devrait poser sur nos peaux un peu plus de douceur.

Je me souviens que septembre, lorsque j’étais petite enfant, rimait avec rentrée scolaire et cahiers neufs bien sûr mais aussi avec pantalon de velours. Sans nul doute, les étés étaient moins chauds et leur fin, surtout, plus précoces. Septembre était définitivement la saison par laquelle on entrait, dès son commencement, en automne. Je me souviens que j’aimais ça. Retrouver l’école, passionnément. Les lignes bleues à remplir de mots, encore davantage. Et la douceur du velours, étonnamment, me rassurait.

Peut-être qu’on devrait s’habiller de velours, peut-être qu’on devrait poser sur nos peaux un peu plus de douceur.

Je crois que cela ne s’est jamais vraiment démodé. Cela me rassurait encore de mettre sur les petites jambes de mes enfants ce velours aux lignes parfois fines, parfois plus larges. Les photos me rappellent leurs couleurs : un rouge bordeaux, des verts sapin ou amande, du bleu d’océan. Ils en ont porté tous les trois de ces pantalons aux lignes douces avant qu’elles ne se râpent aux genoux. Il me semble que j’avais l’impression de leur faire traverser les pluies d’automne et les froids d’hiver avec un peu plus de douceur. Peut-être qu’il m’en coûtait moins de les laisser à la porte de l’école ainsi vêtus avant de rejoindre la mienne.

Peut-être qu’on devrait s’habiller de velours, peut-être qu’on devrait poser sur nos peaux un peu plus de douceur.

Septembre est revenu. Revenu comme avant dans mon Ouest. La pluie s’est invitée, le vent, le froid déjà. L’été nous a quittés très vite cette année. Je ne sais pas s’il est vraiment parti mais ce dimanche, j’ai eu envie d’un peu de velours. Un signe ? Je ne sais pas. Les vacances avaient mis la machine à coudre en pause. Elle m’attendait. Le tissu d’un vieux rose aussi. Petite couture, jolie nouvelle entreprise. Et les heures ont filé, le doux du tissu entre mes mains.

Peut-être que j’avais envie de lui offrir un peu de velours pour les jours de son automne, ceux qui vont fêter sa première année bientôt. Déjà.
Peut-être l’envie aussi de poser un peu de douceur encore sur ta petite vie, Petite-fille.

Au soir, les volets déjà fermés sur le début de la nuit, il reste la lumière de nos intérieurs.
Un peu comme une prière.
Comme cela nous ferait du bien à toutes, à tous, de s’habiller de velours, de revêtir un peu plus de douceur  avant de sortir, avant d’aller au-dehors, avant de  nous rencontrer.

Champ de bataille

On a beaucoup parlé batailles ces derniers temps.
On parle beaucoup de batailles tout le temps.

Il faut se battre pour son avenir, il faut se battre pour une meilleure vie, il faut se battre pour nos libertés.
Il faut se battre pour exister, il faut se battre pour son couple, il faut se battre pour sa famille.
Il faut se battre.
J’ai toujours l’impression, à les entendre autour, que la vie doit s’armer de poings tout le temps.

Je ne suis pas certaine d’être une fille de ces batailles mais je suis sûre d’une seule chose: oser la joie est mon plus âpre et mon plus beau combat.

Un peu plus vrai encore depuis  huit mois et quelques poussières de jours à voir grandir l’enfant de mon enfant. Dans quelques autres mois, l’enfant de mon garçon naîtra à son tour.

C’est comme d’un autre ordre, comme un nouveau chemin de vieillir en laissant la vie peu à peu grandir derrière soi.
Que restera -t-il de moi si ce n’est cette joie de vivre à donner, à transmettre, à aimer ?

Petite fille déjà, quand tes rires aux éclats résonnent, la vie elle aussi a un autre éclat.

Il est des combats qui demandent de sourire et ce combat sur ce champ de bataille là, c’est ma joie.

 

Ses petites mains

Je sais qu’elles peuvent blesser, faire le mal, trahir.
Je sais qu’elles peuvent repousser, gifler, griffer.
Je sais qu’elle peuvent juger, accuser, pointer du doigt.
Mais, depuis toujours, nos mains restent pour moi les possibles du bon et du bien.

Et j’aimerais bien qu’on retrouve nos mains.

 

Celles qui soulagent, soutiennent, réconfortent.
Celles qui se serrent, se tendent vers l’autre, s’accompagnent.
Celles qui pardonnent, celles qui se réconcilient.
Celles qui s’engagent.
Celles qui embrassent.
Celles qui aiment.

Ils semblent dérisoires mes mots, pas vraiment nouveaux, mais tant pis, moi, j’aimerais bien qu’on retrouve nos mains.

 

Je crois que j’ai trop regardé  les menottes de ma petite-fille ces derniers jours. On dirait qu’elle me raconte le chemin à suivre lorsque sa paume découvre pour la première fois le toucher de l’herbe.
Fraîcheur, douceur, picotements.
Elle regarde les curieux fils qui s’élèvent devant elle, elle avance la main, confiante, referme le pouce et l’index, prend délicatement un premier brin puis doucement laisse filer le doux entre ses doigts.

 

Comme elle, j’aimerais bien qu’on retrouve nos mains.
Fermées, ouvertes, priantes.
Aimantes au point d’attraper la joie, au point de garder la vie.