On dirait que chaque chose retrouve sa place. L’une après l’autre. C’est peut-être ça la rentrée.
Les jours d’abord. On les sait maintenant, on les sait par cœur, on ne s’aventure plus à un mais quel jour on est ? L’emploi du temps a repris ses droits lui aussi, ses cours, ses pauses. Il n’y a plus vraiment les on verra demain qu’on s’autorise quand rien n’est urgent. Les jours se déclinent à nouveau comme la litanie immuable du temps. Les heures à l’horloge sonnent désormais. C’est peut-être ça la rentrée.
Les crayons. C’est drôle, les crayons aussi semblent avoir compris. Ils ont quitté la table basse où ils griffonnaient des mots croisés, oublié les lignes bleues des lettres, celles qu’on avait le temps d’écrire encore à l’amie. Ils ont regagné le bureau, la trousse, le cartable. Ils ont rejoint le sérieux de l’étude, des copies, des cours. Les crayons organisent à nouveau l’espace de l’agenda. Leurs mots disent la vie un peu autrement. C’est peut-être ça la rentrée.
Les élèves. C’est curieux, les élèves ont retrouvé leurs places exactement. Ils se sont installés derrière les bureaux presque trop sagement. Ils n’ont pas oublié c’est heureux que la cour gardait leurs courses et leurs souvenirs de jeux mais même là, ils ont retrouvé leur place. Celui qui ose, celle qui attend, celui qui écoute, celle qui parle, celui qui se moque, celle qui crie. Les élèves affichent qui ils sont, cherchent qui ils veulent être. C’est peut-être ça la rentrée.
Mes prières. Comment mes prières pouvaient-elles être ailleurs, à une autre place que celle que je connais par cœur. Comment ont-elles oublié l’espace d’un été les chemins d’habitude. Comment retrouvent-elles avec septembre le tôt des matins, le fond de mes poches au long des journées, mes larmes des soirs fatigués. Mes prières savent elles aussi que leur place est le plein d’une tête qui ne cesse les pourquois, le creux d’un coeur qui ose vouloir aimer. C’est peut-être ça la rentrée.
Et moi. Je retrouve ma place. Celle où j’ai laissé mon empreinte, celle qui me dit qui je suis. Entre les murs d’un collège, par-delà les murs d’une maison, autour des murs d’une église. Là où être à sa place veut aussi dire vivre. C’est peut-être ça la rentrée.