-Alors, bientôt la reprise ? – Et tu reprends quand exactement ? – Prête pour reprendre ?
Reprendre. Le verbe s’est décliné à plusieurs temps ces derniers jours, au rythme des voisins croisés en un bonjour amical, des commerçants habitués qui retrouvent nos bobines, des messages qui reviennent sur mes écrans.
Reprendre. Il est étonnant ce verbe. Comme si j’avais laissé ma vie dans un coin, négligemment posée sur une chaise, un peu comme une veste oubliée et qu’une fois les vacances presque achevées, je la reprenais. Endosser, enfiler les manches, les retrousser même.
Pourtant, je n’ai jamais l’impression de la quitter ma vie lorsque le temps des vacances approche. C’est là aussi qu’elle se fait familière, davantage peut-être. Plus calme, plus douce sûrement. Plus à l’écoute. Est-ce que reprendre voudrait dire aller plus vite, parler plus fort, courir encore ?
Reprendre. Le verbe me plaît cependant. Je sais qu’il va retrouver ce que j’aime. Le collège, les élèves, les collègues. Et l’ordinaire des jours simples. Ceux qu’on coche un à un sur le calendrier, ceux qu’on surligne d’anniversaires, de fêtes, d’attente. Oui, le verbe me plaît. Il rassure mon quotidien de ses habitudes laissées de côté pendant les mois d’été. Pause bien heureuse évidemment mais reprendre le cours de sa vie c’est aussi savoir où l’on est, qui on est, parfois -si peu- où l’on va. C’est se soucier du lendemain et l’aimer, coûte que coûte.
Reprendre. Le verbe me fait écrire. Les vacances ont éteint mes mots. Comme si l’ordinaire des jours était inspiration. Respiration peut-être.
Reprendre. Comme ajouter au temps les jours passés, ceux où l’on avait laissé la porte vers le jardin ouverte, la table joliment souriante, les bavardages à pas d’heure.
Reprendre. Comme repartir d’un bon pied, celui qui a traîné sur les chemins, s’est amusé dans les vagues, s’est reposé sans compter.
Reprendre. Comme arracher au temps qui passe des bribes de nos vies à continuer.