Quand ma prière tempête

Ma petite prière suit le cours du temps. Du temps qui passe oui bien sûr mais aussi du temps qu’il fait.
Si, en vrai.
Même que depuis Noël, elle tempête et grelotte plus souvent qu’à son tour.

Tout y passe: le monde mal fichu, le virus et le virus encore, les matins où l’on ne sait pas qui va être là, quel collègue à remplacer au pied levé, quels élèves à accrocher, à raccrocher encore, à donner simplement le goût d’être au collège  malgré tout, et les soirs imprévus où il faut aider M. à remplir sa feuille pour la CAF parce qu’ils n’ont encore rien compris à sa situation, à faire rentrer dans des cases ceux qui ne cochent pas le bon numéro, ces soirs à écouter des peines, et les veillées enfin à essayer d’attraper des mots un peu plus doux pour trouver le sommeil.
Et ma prière tempête, s’écorche aux rochers des jours, s’accroche aux vents mauvais. Tout y est : le monde que je voudrais autrement, les malades que je souhaiterais guéris, et même la mort injuste, là, qui frappe depuis quelques semaines, je Te demande d’arrêter le cours de ce temps. Un peu de répit, dis, un peu !

Pourtant, ma petite prière, elle devrait éclater doucement de joie au rythme des bonnes nouvelles qui existent encore, celles du doux des amis, du foyer, de la famille mais non, elle tempête, s’emporte, s’éclate en ressac qui casse tout sur son passage. Une amie me glissait ce message avant-hier : “Le monde hurle très fort en ce moment. Plus fort je trouve. Ça heurte même les bons moments ou plutôt ça hurle juste après les bons moments, comme pour les voler, les ternir d’un « ce bonheur-là est égoïste »”.
Tellement juste.

Alors peut-être bien qu’elle n’ose plus cette petite prière Te dire merci pour le bon, le bonheur, les heures jolies qui sont là, encore.
Elle a peur d’une joie indécente qui afficherait un sourire comme si de rien n’était. Elle a peur d’oser dire le besoin de douceur, de se faire du bien, de regarder le beau.

C’est pourtant cela qu’elle me murmure, apaisant le souffle de mes colères, me prenant dans ses bras, effaçant d’un revers de mots les larmes futiles.
“Il faut encore aimer, aimer le monde, il faut encore oser.”

 

 

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