Petite pause (4)

Des pauses sur le chemin

Il est presque l’heure de partir. Les valises sont prêtes.

De ces petits voyages beaucoup disent que j’ai de la chance. Je crois que ce “beaucoup” a raison. Non pas dans le simple fait de voir un peu de pays – je ne suis pas une grande voyageuse en vérité – mais dans le fait de me déplacer.

Me déplacer.
Regarder ailleurs, autrement. Regarder encore et toujours quand trop souvent j’oublie de voir.
Je crois que même sans faire une valise c’est ce que Dieu me demande de faire dans ma vie. Me déplacer. Faire bouger mes lignes. Réfléchir. Oui, tu le sais bien qu’à prononcer “réfléchir”, il y a déjà un voyage, un détour, un retournement.
Me déplacer.
Non pas me mettre à la place de. Qui le pourrait ? Pas moi en tous les cas. Mais essayer d’être capable de regarder ces autres places. Cela me fait sourire parfois parce que – et ceux qui me connaissent bien le savent – je suis une fille des habitudes, des rituels, du quotidien ordinaire et guère une baroudeuse, une aventurière, encore moins une rebelle. Mais est-il besoin d’aller très loin pour se déplacer vraiment ? Je connais de ces moniales qui ne bougent pas d’un pouce et qui font les plus grands voyages.
Me déplacer.
Ce matin, en entendant ce Samaritain si souvent entendu, je me suis rappelée que de cette parabole, on oublie souvent les pas que chacun fait pour avancer. Peut-être même pour aimer. Qu’il est si facile, enfermé dans nos lois et nos préceptes, nos visions et nos avis, nos certitudes et nos batailles, de passer tout près sans regarder. On commente ceux qui ne s’arrêtent pas et on les oppose si facilement à celui qui fait halte. Mais on parle si peu du voyage. Or, tous se déplaçaient. Un homme allait de Jérusalem à Jéricho. Un prêtre et un lévite passaient par ce chemin. Le Samaritain lui-même était en route. Voilà, on le sait bien, c’est dans le déplacement que l’on avance mais souvent le déplacement ne suffit pas. Et, avouons-le, on aimerait tant être dans la halte du bon, dans l’attention qu’il porte à regarder, à s’arrêter, à soigner. On aimerait tant avoir le beau rôle. Mais passer en regardant du coin de l’œil et sans s’arrêter, c’est bien plus souvent cela nos quotidiens.
Me déplacer.
Peut-être que dans le partir, ce qui nous fera grandir, c’est surtout cet arrêt, cette pause, ces petites haltes.
Celles que l’on prend sur le chemin pour regarder. En vérité.
Et qu’il serait bien hâtif de croire que le déplacement de nos pas suffit pour faire beaucoup de chemin. Un pas vers un voyage non pas seulement sur les routes mais pour se poser, au-dedans.
Me déplacer. Faire bouger mes lignes. Réfléchir.

Il est presque l’heure de partir. Les valises sont prêtes. Je crois que je vais tenter les petites pauses sur mon chemin.  😉
À bientôt.

Petite pause (3)

Des lectures ou d’un éloge des romans policiers

Il y a avec  l’été – je dis bien l’été et non pas seulement les vacances – il y a, avec l’été, ce temps que je prends et peut-être plus exactement que j’accorde à la lecture de romans policiers.

Bien sûr, dans la pile de livres que je n’ai pas manqué de faire encore grimper tout au long de l’année, il y aura aussi quelques beaux textes de méditations, de recherches bibliques, de prières peut-être même, attrapés dans les rayonnages de l’abbaye de Bellefontaine ou sur les recommandations de Sœur Marie ( et je reviendrai vous en parler je pense). Bien sûr, il y aura aussi quelques jolis romans offerts au gré de fête et d’anniversaire et pas encore ouverts. Bien sûr, il y aura, avec la fin août, quelques nouveaux ouvrages de pédagogie, histoire de revenir doucement.
L’été possède ce temps précieux qui me laisse du temps…loin des copies, des cahiers et surtout des écrans ! Mais il y aura surtout, au cœur de l’été, sur un coin de plage encore tranquille, sous le frais d’un chêne ou encore au profond d’un bon fauteuil, la lecture de romans policiers. Mélange hétéroclite de mes lectures qui serait incomplet si je n’y ajoutais la relecture régulière de Victor Hugo, de Zola ou de Flaubert, la poésie de Baudelaire, de Prévert ou de Chédid, la littérature jeunesse à toujours découvrir, les BD laissées traînées par un mari féru de bulles, les recherches récentes et pourtant antiques d’un monde gréco-romain que j’affectionne tout particulièrement. Et je n’oublie pas quelques manuels de recettes de cuisine qui sont encore des occasions de me… nourrir. 😉 Bref. Loin de moi l’idée d’étaler “ma culture” mais davantage de redire un peu d’essentiel : si le monde aujourd’hui est aux écrans et aux oreillettes, le silence qui imprègne le temps de mes lectures reste, de tous les temps de ma vie, irremplaçable. Les mots des autres, voyages de mes romans d’enfant, étaient là bien avant que je ne trouve les mots pour parler et rien ne peut remplacer ce que toutes les pages lues ont fait de moi.

Lire, pour moi, c’est comme une éternelle gratitude du temps pris au temps.
Mais je m’égare un peu,  revenons aux romans policiers.

Je n’en lis jamais pendant le reste de l’année et pourtant j’aime passionnément ces lectures. Comme à l’habitude depuis des années, les couvertures sombres des collections “polar” viendront donc à nouveau s’ajouter à mes heures de… pauses estivales.
Après le Paris de Fred Vargas,  la Suède de Henning Mankell, l’Islande d’Arnaldur Indridason, l’Israël de Dror Mishani en passant par la Norvège de Jo Nesbo et la Venise de Donna Leon, me voici enfin prête à me plonger dans la Chine de Qiu Xaolong ! Que de voyages me direz-vous ! Et bien oui, c’est sans doute cela.
On pourrait croire le roman policier noir, glauque et pervers, cruelle plongée dans les bas-fonds de l’humanité, drôle de balade au cœur des vices et des péchés innommables, sans doute ne serait-on pas loin de la vérité. Pourtant, si la noirceur de l’humanité se raconte sur ces centaines de pages, j’y trouve à chaque fois des raisons d’un voyage fait aussi de… lumière. Et c’est peut-être cela que j’aime. La lumière d’une justice d’hommes qui tentent, au mépris de vies qui pourraient sans doute être faciles, de chercher à réparer. La lumière de pardons parfois, ceux qui nous font si souvent défaut dans le quotidien de nos vies. La lumière enfin de ce quelque chose qui fait avancer l’homme malgré tout. Malgré vraiment tout.

Il y a, avec l’été, ce temps que je prends et peut-être plus exactement que j’accorde à la lecture de romans policiers.
Petites pauses alors bienvenues qui, au profond des ténèbres de l’humain, redonnent une  place à l’espérance. Et ce n’est pas vain, je vous l’assure. 😉
Bonnes lectures à vous…et à partager peut-être !

 

Petite pause (2)

Et il y a les pauses prières.

 

Dans le silence d’une aube encore endormie
Seule l’écume sonore réveille l’espace
Rumeurs tapageuses, remords délivrés, colères crachées
La mer s’échoue au pied des rochers, les poings serrés frappent, les regards levés éclaboussent, l’onde impatiente martèle le roc, se brise, se lasse, s’apaise
Et l’eau se déchaîne encore, s’insurge, se révolte
Bruyant écho des chaos de nos cœurs

La pierre semble ne pas vouloir répondre, infaillible, immobile, présente
Souveraine
Elle attend que la mer se calme. Puissamment.

Et les vagues se retirent peu à peu, d’abord têtues, rebelles, puis plus tranquilles
Presque douces, elles viennent maintenant caresser le rocher d’une main amie
Confiantes, elles s’abritent aux flancs du récif, se logent en son creux, cherchent un refuge

Rocher de mes prières, rempart de mes colères, abri de mes faiblesses
Tu me gardes au creux de Ton amour comme une vague épuisée.

 

Petite pause (1)

Petites pauses. Petites poses aussi.
C’est ce que je vais vous écrire un peu cet été sur un fil d’une pile de lectures à partager, de paysages beaux comme des clins Dieu, ou peut-être de rencontres qui font grossir le cœur. À quel rythme ? Je ne sais pas. On verra bien ce que mes yeux trouvent à raconter. Une chanson…?  ou mes oreilles qui sait !  😉

Et ça commence là. Premier jour de vacances.
Petite pose… en photo souvenir

Je ne sais pas vraiment pourquoi mes enfants le sont tant.
Complices.
De cette complicité qui garde les mots murmurés, partage les rires, aime la vie et fait des projets. Bien sûr qu’il y a leur vie, les études, le travail, les amoureux et amoureuse qui comptent, et pour nous aussi. Bien sûr qu’ils ont leurs propres ailes, leurs propres chemins, leurs jardins secrets.

Mais il y a cette photo.

Je crois qu’à force de vivre beaucoup de belles choses et des moments plus difficiles ensemble, il reste cet “ensemble”. Et cette promesse qui répète le mot : “On partira toujours en vacances ensemble, même si on ne vit plus ensemble.”
Voilà. On vit ça maintenant. Une chance. Un trésor.
Au milieu de nos projets aux uns et aux autres, on essaye de prendre le temps d’un temps ensemble.

Rien n’a vraiment changé. Je prépare mes petites listes, encore et toujours pour que nous puissions partir avec eux dans une semaine et ne rien oublier. Et en les écrivant, je lève la tête sur le panneau de photos au-dessus d’un bureau, là où j’ai posé des souvenirs pour garder le précieux en vue.
Je décroche l’une d’elles.
Je regarde de plus près.
Je me souviens bien.
J’ai toujours aimé photographier ces instants-là.
Instants de pause, au gré d’une plage, à regarder des petites choses de rien du tout sur le sable.
Ensemble.

 

On verra bien ce que mes yeux trouvent à raconter.
Peut-être que c’est cela une vraie pause d’été quand on a ma chance de pouvoir la vivre comme on veut vraiment.
Retrouver nos regards, le presque même que Lui, pour toutes les petites choses de rien du tout.

 

 

13 minutes et des poussières

Il y a des moments très jolis. De tout petits instants.
 Ma petite Marie, aujourd’hui et au hasard de son ordinateur, dans les dédales de fichiers qu’on range sans les ouvrir très souvent, a retrouvé des photos oubliées de vacances en Bretagne.
Mes enfants adolescents. Leurs rires. Leurs bons mots. Leur complicité.
Et une petite vidéo. Un peu longue quand même.
13 minutes et des poussières.

13 minutes et des poussières.
Pierre avait 15 ans et son portable. C’est étrange parce que même si j’ai joué la maman frileuse sur les outils de communication qui débarquaient dans notre vie il y a moins d’une dizaine d’années, j’ai très vite aimé cette manière d’avoir un téléphone, d’attraper des instants en photos, de filmer des bouts de nous. Et de les garder.

13 minutes et des poussières. À faire défiler une route familière du Morbihan et à écouter leurs voix. Leurs voix qui rient, leurs  voix qui chantent, leurs voix qui blaguent à l’arrière de la voiture.
Et surtout leurs voix qui s’aiment.

Et notre silence à nous deux, à conduire, à regarder cette même route, à les écouter sans doute et sans rien dire.
13 minutes et des poussières et vers la neuvième je crois, ma voix.
– Vous êtes heureux ?

Je ne suis même pas certaine de l’intonation interrogative de ma question.
Je ne suis même pas certaine que ce fût une question.

13 minutes et des poussières.
Il y a des moments jolis. De tout petits instants.
De présent et de souvenirs et de nos vies mêlées qui me font dire et redire que je ne me trompe pas à aimer comme Il m’invite à le faire.
Tout le temps. Et seulement ça.

Prière de fin d’année

Semaine sans mes élèves à déposer des mots qui feront des bilans, qui raconteront les fins, qui leur espéreront un bel été.
Semaine sans eux à imaginer déjà des (re)commencements avant les vacances qui laisseront en repos le temps… pour un autre temps à aimer.  

 

Seigneur

Je veux garder du souffle
Pour pouvoir te parler
Langage de mon âme
Te dire les mots
Sans cris, sans peur, sans larmes

Je veux garder au cœur
Les mémoires enfantines
Les détours, les chemins de traverse
Les sentiers délivrés
Où j’ai pu te croiser

Je veux garder le goût
Des matins espérés
Des soirs fragiles
Des jours amers et des nuits rêvées
Où je t’ai rencontré

Je veux garder du temps
Pour aller Te trouver
Instants bénis, précieux moments,
Issues promises
De silence, de liberté, de tendresse

Je veux garder encore
Tous les mots ramassés
Les pépites d’amour, les regards d’amitié
Partager avec eux ta prière
Partager avec eux ta présence
Unir nos respirations, nos vies, nos chemins
Et Te prier encore

Amen

 

Prières brûlantes

Je crois que parfois nos souvenirs se cachent à fleur de nos vies et qu’il suffit de peu pour qu’ils reviennent à nos mémoires.

La chaleur juste arrivée chez moi depuis hier a brûlé ma peau, étouffé l’air qu’on respire et je me suis rappelée.

C’était un 27 juin aussi. Mais un dimanche.
L’été de mes 9 ans est longtemps resté comme l’été de LA sécheresse et la chaleur dès ce matin-là ne démentait pas sa future réputation. Je ne me souviens pas vraiment de la longue messe sauf qu’elle était longue pour une petite fille pourtant sage et qu’elle faisait lever mon nez vers la nef d’une cathédrale où je mettais les pieds pour la première fois. C’était le fils d’un ami de Grand-père. Un très bon ami et nous étions assis tout près, ce qui immanquablement a dû me faire tenir tranquille.
Le soir en rentrant de l’ordination du fils de Marc – c’est comme ça que j’ai longtemps appelé le père Denis – j’ai soufflé sans doute un peu trop fort et soupiré un plaintif “j’ai eu si chaud et c’était si long”. Comme toujours, un vieil homme au regard clair m’a prise au mot :
– Tu ferais bien d’écrire une petite prière… brûlante, alors !
Je l’ai écrite.
Avec mes mots d’enfant et je peux la relire encore. Elle Te demandait pardon de ne pas avoir aimé ta messe et rien de rien car tout était très lent vraiment Jésus ce n’est pas possible si lent et merci des choux à la vanille juste après et de l’orangeade vraiment délicieuse.  Des mots d’enfant, écrits avec le cœur, sans nul doute.

Je ne savais pas que ma petite prière trouverait un autre écho presque 20 ans plus tard.

 

Ce matin-là, ce n’était pas juin mais une toute fin d’avril et étonnamment le premier jour très chaud d’un printemps plutôt maussade. Tout avait été annoncé mais peut-être un peu moins qu’aujourd’hui et nous nous étions réjouis à l’avance de ce qui serait une très très belle journée. On se disait que peu importait de toute façon, qu’il pouvait bien pleuvoir ce jour-là, ce serait le plus beau quand même. Il n’a pas plu et comme annoncé, nous nous sommes mariés sous un soleil ardent. Brûlant. Le temps de la messe dans la fraîcheur de la vieille église où j’avais été baptisée a rappelé aux plus proches que le baptême avait été aussi “des plus chauds”. Je me souviens que cela m’avait fait sourire.
Ce n’est que deux jours plus tard que j’ai écrit ma deuxième petite prière brûlante peut-être parce que j’aurais tant aimé que le vieil homme soit encore présent.
Avec mes mots de jeune femme et je peux la relire encore. Elle Te demandait cette volonté-là pour aimer toute une vie et merci parce que tous, absolument tous, étaient venus. Il ne manquait personne. Même lui était là.

 

Je ne sais pas si un jour il y aura une petite prière brûlante numéro 3.

J’aime bien relire ces deux-là parfois.
Quand le temps devient brûlant, curieusement, elles me procurent cette petite fraîcheur en me rappelant le pourquoi Toi, Tu es là, dans mes jours, pourquoi  j’aime Ton Église, pourquoi j’aime la vie.

Clin Dieu un peu bancal

Je voulais vous raconter un p’tit truc vite fait mais en vrai, je vais bien prendre mon temps.

Ce matin, c’était un dimanche tout soleil. Pas seulement par la fenêtre non, tout soleil aussi au-dedans. Peut-être parce qu’il n’y avait ni cours à peaufiner ni copies à corriger, que tout était prêt pour la dernière semaine de classe, peut-être aussi parce que la fatigue avait laissé place à une tête plutôt bien reposée.
Ce matin c’était un dimanche tout rempli. Le café vite bu, l’éveil à la Foi des tout-petits avait encore une prière à écrire, et sur un coin de cahier dans la cuisine, entre les lignes et les plats j’ai posé les mots tout en préparant le déjeuner. Mais la cuisine, tu as bien le temps, mais non, ce sera fait, on pourra filer faire une grande balade ensuite et profiter du temps et.
9h45. Dans 30 minutes en route vers l’église. Vite, plier du linge avant. Et si je cueillais les derniers Astroemères pour en faire un bouquet et.
10h00. La pile de linge dans les bras, je cours presque. Pour tout faire. Le pied gauche n’a pas le temps de s’arrêter devant le pied d’un lit qui lui n’a pas bougé d’un poil. Les secondes qui ont suivi ont juré tous les dieux de ma mythologie. (Jésus pardon mais je t’ai quand même épargné sur ce coup-là.)
Vous savez le pied nu dans un pied de meuble, oui.
Bien.
Et sinon, et bien continuez à écouter la petite voix de l’enfance que j’ai cru reconnaître: “ça fait mille fois que je te répète de ne pas courir pieds nus.”
Voilà.

Clopin-clopant. Boîte à pharmacie. Strapping pour les randos, heureusement équipée. J’ai attelé le petit doigt de pied à son voisin. Et j’ai tenté de continuer. Pas très longtemps. Eveil à la Foi heureux mais douloureux.

 

Déjeuner tranquille, finalement j’ai souri, au moins tout était prêt.
Pas de grande balade mais un bon fauteuil, jambes allongées, à l’ombre des chênes. Le soleil. Un peu de vent encore, léger. Et une pile de bouquins.

Une pile.
Des heures à lire.
Des heures arrêtées, à ne rien faire.
Une heure à écrire.
Les évangiles de Coquille enfin bouclés.
Le bonheur.
Si.

 

Enfin presque. Le petit doigt de pied violacé m’a un peu titillé, puis s’est calmé. Cassé ? Peut-être. Peut-être pas. J’avance quand même. Clopin-clopant.
Je peux conduire. Rien de grave.
Presque le bonheur de redécouvrir découvrir la lenteur. Et d’avoir “fait” un peu d’essentiel. Je crois même que mes chers élèves vont apprécier demain ce ralenti.

Parfois, tes Clins Dieu….Bref. Bon j’en veux bien quand même de Ton Clin Dieu un peu bancal qui heureusement me laisse le temps de réparer ça avant une mi-juillet et un départ pour marcher, se balader, visiter, rencontrer bref pour galoper avancer encore.  😉

(En vrai, j’ai envie d’écrire un grand MERCI 🙂 )

Sur le bord (8)

 

Ciel du soir
Fatiguée
Je vais m’asseoir près de Toi
Goûter la tranquillité, la fin d’une journée, le repos des heures
Apaisée
M’abreuver encore à la lumière du jour,
au calme des ombres, au doux du temps qui s’arrête. Enfin.

 

Recueillir les bruits, les blessures, les peines et les jeter au loin
Attraper au vol la douceur qui chancelle, m’attarder sur sa rive, la garder
au cœur de ma prière, au creuset de mes mots, au creux de mes paumes
Rester là
Sur le bord de Ton silence.

 

 

 

Sur le bord (7)

Ce bord-là, j’avoue que je l’aime beaucoup.
Pas de cette nostalgie qui vous plonge et vous enferme dans le passé, non, j’aime bien le bord de mon enfance parce que paradoxalement, il me tourne vers mon demain.
Je m’y retrouve c’est vrai et je me retrouve aussi, pour continuer. L’image a beau être galvaudée, elle est souvent juste: nos racines nous font grandir encore.

 

Ce long week-end de Pentecôte a ouvert trois vieux cartons laissés fermés depuis quelques années. Je savais ce qu’il y avait dedans et pas vraiment de place pour ranger des albums “rouge et or”, la collection intégrale au dos criant de fuschia de la comtesse de Ségur, et des Martine aussi. Peut-être bien que j’aime raconter beaucoup plus fièrement l’audace des Club des cinq, la frondeur des collections vertes que j’empruntais aux garçons ou même des Fripounet remplis d’astuces: eux, ça fait longtemps que je les ai déballés.
Mais ces petits cartons aux allures rose bonbon, non.
Je crois bien qu’on aime une partie de soi toujours un peu plus qu’une autre.

J’ai ouvert le premier sans surprise. La comtesse était là avec ses malheurs de Sophie et son pauvre Blaise. Sourires.
J’ai ouvert le deuxième, les Martine trop sage. Sourires.
Et le dernier, plus léger, oh… quelques Fripounet oubliés. Des bricoles hétéroclites et quatre petits livres de poche.
Quatre petits livres. Oubliés. Presque complètement.

Et un. Parmi les quatre.

C’est étrange la mémoire.
Je me suis d’abord rappelée de sa couverture.
Le jeune garçon aux lèvres pincées, les bras repliés sur son guidon. Oui, je me souviens.

C’est alors que j’ai aperçu l’auteur.

 

L’étonnement est difficile à dire avec les mots.

Surtout quand ils cherchent comment la mémoire a pu oublier. Et son nom. Et l’histoire même de ce petit livre.
Je me suis arrêtée et trois quarts d’heure plus tard, j’ai émergé de ses pages jaunies par le temps.
Je n’avais rien gardé.
Rien de ce petit livre.
Juste le souvenir de l’avoir lu oui, ce dessin en noir et blanc à la dernière page, une fin  d’histoire peut-être mais si peu. Tellement peu. 
Ni l’histoire au fond.
Ni les prières d’Israël d’un petit garçon à bicyclette.
Ni les rues de Jérusalem.
Ni le titre de ce chapitre 3 “qui gravira la montagne du Seigneur ?” et mes souvenirs de balade à vélo avec ses mêmes mots pourtant. Exactement.

Il y a deux ans et demi, juste avant de partir en Terre Sainte, on m’a beaucoup parlé d’Amos Oz.
J’ai entendu là son nom pour la première fois.
C’est ce que j’ai cru.
Depuis j’ai lu neuf de ses romans. Je me disais depuis quelques jours d’ailleurs il faudrait que je lise encore, arriver à ma petite dizaine. J’aime bien lire autant que j’aime.

C’était sans compter sur ce rebord du temps qui m’avait une fois de plus bien devancé.
Voilà, je sais pourquoi j’aime tant le bord de mon enfance. Encore une fois, je m’y suis retrouvée.