Ton Ciel

Soir 27

 

Au matin, j’ai installé mon Joseph près de l’étable. Il lui fallait nettoyer un peu, déposer de la paille, s’occuper des animaux. Marie attendait tout près, le souffle déjà court. Inutile de chercher ailleurs mon bon Jo, il n’y aura rien de meilleur que cet abri de fortune.

J’ai cuisiné en les regardant de temps en temps, rapprochant mes bergers qui ne savent rien encore, rassemblant mes villageois qui se dirigeront vers la petite chapelle bientôt, surveillant ma Marie qui voulait rassurer son Joseph. Ce sera bien, on est bien ici, il fait bon et puis, personne ne viendra nous ennuyer. Ne t’inquiète pas Jo, tu as fait tout ce que tu pouvais.

Dans ma cuisine, juste à côté, ça sentait bon le pain d’épices, les tuiles au parmesan et la joie. C’est vrai. Même si pour moi, Sa naissance, à raconter, ressemble toujours à une immense inquiétude. Comment naître là ? Comment tout cela peut-il se faire ? Je leur ai fait confiance.

Ce soir, mes mariés de Bethléem sont couchés tous les deux sur la paille fraîche, ils se réchauffent et même si leurs regards sont ailleurs, on dirait bien qu’ils sont au milieu de nous.

Alors, on a dîné joyeux. Nos mariés à nous sont arrivés de leur Bretagne. Pas encore un repas de fête mais l’ambiance est un peu là. Les lumières du sapin osent le dire. Les bougies gardent le temps précieux qui veut bien ne pas s’écouler trop vite.

L’heure tourne pourtant. On a étalé les cartes sur la table. J’aime bien ce jeu en ce moment. On y jouait même dans la salle des profs la dernière semaine avant les vacances, histoire d’être ensemble. Je me souviens qu’une collègue a demandé pourquoi il s’appelait ainsi. Personne ne savait.

L’heure tourne. Moi, je me suis demandée si j’aurais le temps d’écrire ce soir. On jouait. On était bien. Et puis, qu’est-ce que je vais encore pouvoir écrire ? Que Jo a enveloppé de la paille dans un linge propre et l’a déposé sous la tête de Marie. Elle est bien. C’est étrange comme la nuit se fait plus douce soudain.

Marie s’est endormie. Enfin.
Par les interstices du toit, Jo regarde le ciel. Ton ciel, Jo.

Skyjo.

 

 

Je le dirai à mes collègues en Janvier que ce jeu va bien avec ma crèche. 😉

 

Oh demain, je n’aurai le temps de presque rien ici mais je vous promets, je passe pour un dernier mot, mais cette fois au midi. Pour garder le dernier soir pour Lui.

à demain 😉

 

Mères

Soir 26 ( il n’en finit pas cet Avent 😉 )

 

Jeudi. Voilà. On y est. Les enfants sont tout près, et pour d’eux d’entre eux, venus déjeuner ce midi, c’était déjà la joie. Je n’ai pas encore mis les petits plats dans les grands. Mais quand ils sont là, c’est qu’on y est. Noël peut s’installer tout à fait.

Jeudi. Voilà. Je radote souvent avec mes enfants. J’essaie pourtant d’être délicate quand Maddy qui n’a pas pu un seul jour tomber enceinte – elle est étrange cette expression. Tomber. Comme si ça tombait sur les unes et pas sur les autres. –  quand Maddy me raconte ses souvenirs parce que même si elle me dit que ses nombreuses nièces et nombreux neveux ont empli son espace, je sens qu’il y a ce tout petit quelque chose dans sa voix.
Je sais celles qui ont fait d’autres choix, je sais celles qui sont heureuses, je sais celles qui souffrent, je sais celles qui n’en peuvent plus de souffrir.

 

Jeudi. Je me souviens de cette promesse faite par celui qui devait devenir mon mari: “Oui, si nous ne pouvons pas avoir d’enfants, nous en adopterons”. J’avais besoin de cette certitude. Il y en a d’autres qui auraient demandé je ne sais quoi avant de se marier, moi, je voulais juste ça. J’ai eu la chance de mes trois bébés. Je songe à l’ami qui a accueilli trois enfants aussi, pas de son sang mais ses enfants pleinement. Et à chaque fois, j’ai pensé à mon Joseph.
C’est Ton fils.
Infiniment Ton fils.
Il le sait Joseph. Je vois qu’il le sait quand il conduit Marie sur son petit âne. Ils sont au bord de Bethléem ce soir et nul autre que lui ne s’inquiète davantage pour son enfant.

 

Jeudi. Voilà. Nos enfants sont bientôt tous là. Et ma crèche inévitablement pense aux mamans ce soir. À toutes. Celles pour qui rien n’est simple, celles pour qui tout semble aller bien. Celles d’hier, d’aujourd’hui, de demain.

Et Toi, petite Marie. Je pense à toi. Ta faiblesse et ta force. Ton silence et tes paroles. Ta douceur et tes colères. Tes joies et ta souffrance.
Et rien, au fond, ne me fait aimer Dieu davantage que par et pour toi.

à demain.

 

PS: vous savez, dans ma crèche, j’ai même une maman-poule. 😉

Marcher sous la pluie

Soir 25

J’aime bien marcher sous la pluie. Avec la capuche quand même, il pleut vraiment.

Il n’y a pas de pluie sur ma crèche bretonne. C’est à se demander.  😉 Pourtant, les tempêtes et les vents mauvais font bien partie de nos paysages. De tous nos paysages.

Mais nos crèches n’ont jamais le gris des ciels.
Sa lumière, seulement.

 

J’aime bien marcher sous la pluie. J’ai marché longtemps, ça fait du bien, histoire de prier du bout des pieds, du fond du cœur. Sur ce chemin d’Avent qui s’achève, respirer le temps, regarder les gens, se dire que la vie est drôlement étonnante tout le temps. De cet étonnement qui a peut-être saisi les jeunes parents devant leur enfant naissant. Lui, si petit, si grand. Et eux, simplement là.

 

Pendant ma balade, Joseph et Marie ont marché eux-aussi. Tout doucement mais Marie avait besoin de dégourdir ses jambes. C’est parfois comme ça à deux ou trois jours d’un accouchement, un regain de force. Comme s’il fallait s’armer. Je m’en souviens.

C’est le soir. Ils sont fatigués; moi aussi, un peu. Nous avons bien marché.
Joseph est là, simplement. Marie, tout près, attend. J’aime me reposer près d’eux.

à demain.

Menus et instants précieux

Soir 24

 

C’était l’heure des menus aujourd’hui. J’ai déballé les recettes et les livres sur la grande table,  toujours devant ma crèche. C’était l’heure des menus et il y a du pain sur la planche parce que cette année tout se joue à domicile. Et cela me rend heureuse. Un tantinet occupée mais heureuse de ces instants à venir, précieux.

J’aime cuisiner. Le simple et le bon. J’aime cuisiner pour ceux que j’aime alors Noël, ça tombe plutôt bien. Je suis sûre que Marie et les femmes qui l’entouraient aimaient cuisiner. Les femmes de son Orient natal aiment les parfums des épices, le miel et le lait, le simple et le bon. Et les sourires autour d’un repas comme la certitude de savoir que l’instant est précieux.

J’aime servir aussi, le tablier pourrait être noué comme Lui. 😉 J’aime apporter les plats, servir les assiettes, ne rien oublier. Oh… je ne manque jamais d’aide, jamais ! mais souvent j’aime leur dire restez assis, restez, vous êtes bien. La joie de ma cuisine va jusque là. Sans servitude aucune, non. Simplement, savoir qu’autour de ma table, pendant ces Noëls-là, l’instant est précieux.

C’était l’heure des menus aujourd’hui, des petites listes pour vérifier que tout sera bien là pour mes recettes. Les santons cuisiniers dans ma crèche sont nombreux. Ils portent les pains, les galettes, les poissons… mais il n’y a pas de table. Pas encore. On dirait que pour eux aussi, c’est l’heure des préparatifs.

Sur la route, Joseph a laissé le petit âne se reposer avant Bethléem. Dernière étape. Le repas se fait un peu plus maigre mais il espère encore l’auberge pour sa Marie. Son ventre bien rond se tend certains soirs, se fait dur, il va être bientôt l’heure. Joseph s’inquiète encore, Marie le rassure. C’est elle à nouveau qui partage le simple pain du menu. L’enfant a bougé. Instant précieux.

 

à demain.

 

 

Un Père-Noël, une rose et une prière

Soir 23

 

Lundi s’est installé tranquillement. Aujourd’hui, ma crèche m’a regardée emballer mes cadeaux. J’aime bien ça faire les petits paquets avec les petites choses qui sans nul doute feront plaisir. C’est mille fois galvaudé ce que je vais dire mais c’est mille fois vrai : il y a bien plus de plaisir à offrit qu’à recevoir.
J’en ai profité pour avancer mes Mages d’un poil. Parce qu’ils sont très loin et qu’il faudra qu’ils soient prêts à partir. Bientôt. L’étoile brille déjà.

Lundi s’est installé chaleureusement. Encore un goûter pour un autre filleul. Mon plus petit mais déjà grand du haut de ses 5 ans et demi. Je n’ai pas beaucoup parlé d’enfants pendant cet Avent pourtant vous savez combien ils comptent. Ce n’est pas l’insouciance ni la naïveté que j’aime dans l’enfance. J’aime surtout la sincérité et lorsque Nathanaël m’a dit que ma crèche était très belle marraine, ça veut dire qu’il la trouve très belle. Sans faux-semblant.

Lundi s’est installé autour de la table encore une fois. J’ai bien remarqué que mes santons lui trouvaient un drôle d’air à ce gars rouge coca-cola.  Je leur ai dit que ça faisait partie du folklore. Je crois qu’ils ont compris l’idée. L’idée de joie à donner, de douceur à partager quand tant et tant sont tristes et sans rien.

 

 

Et j’ai pensé à la petite Vicka.

Vicka venue d’Ukraine un temps avec sa maman et ses tantes et cousines, dans notre paroisse et retournée depuis dans son pays, à Lviv. Celle qui avait fait une rose en pâte à modeler un dimanche d’éveil à la Foi.

Une pensée pour ces visages que nous avons croisés quelques mois et qui nous envoient des nouvelles régulières : “8 à 10 heures de coupure d’électricité par jour… la vie difficile… mais s’il vous plaît, chers amis, une seule chose: priez pour nous”.
Une prière, c’est tout ce qu’ils nous demandent.

J’ai trouvé mon Père-Noël presque ridicule.
Et mes paquets.
Et le doré de nos Noëls.

 

Alors, Joseph le juste, le doux, m’a regardée du coin de l’œil.
“Ne te trompe pas. La joie n’est pas de s’en priver parce que tu l’as et d’autres moins. La joie est de la répandre, de la donner. Continue.”

Il m’a encore dit de continuer.

J’ai souri. J’ai prié pour Vicka et tous les siens. J’ai prié pour mon petit Nath. J’ai prié pour tous ceux que j’aime et que je vais bientôt revoir.

 

à demain.

Continuer

Soir 22

 

Il est long ce temps d’Avent et tant mieux d’y être encore, ce soir.

Parce que ma crèche est là et qu’auprès d’elle, j’ai écrit mes cartes de Noël. Pas très loin, il y avait une finale de foot que je ne voulais pas regarder et pas à cause d’un boycott mais juste parce que je n’aime pas trop alors j’ai sorti des bouquins et mes cartes de Noël. Et le téléphone tout près qui donnait quand même les résultats parce que je n’aime pas trop les matchs mais les victoires quand même un peu.
J’ai attrapé au passage des messages idiots sur les réseaux. Je crois que les gens devraient choisir l’option de se taire souvent. J’ai éteint. Tant pis pour le résultat. J’ai donc écrit mes cartes avec ma crèche tout à côté.

Joseph m’a inspirée. Il est inspirant. Il m’apprend toujours le temps qu’on doit prendre avant de parler ou d’écrire et le silence parfois qui vaut mieux que tout. Il dit la confiance bien sûr, évidemment. Mais pas seulement. Joseph c’est tout sauf une confiance aveugle. Joseph, c’est le gars qui continue. Qui continue à aimer, qui continue à croire, qui continue à avancer. J’aime bien sa force de continuer.

Je l’ai regardé encore, ce petit santon de Jo, faisant cheminer sa Marie et son bébé.
J’ai fermé quelques enveloppes. On a perdu la finale. Je me suis dit qu’on allait continuer Noël et que rien ne changeait l’essentiel.

Il est long ce temps d’Avent. Je vais continuer à L’attendre. Encore.

à demain.

De sa crèche à nos tables

Soir 21

 

Premier samedi de vacances. La table s’est mise en fête. Noël au goûter.

Les santons nous ont regardés, sans broncher, l’air de me dire c’est un peu étonnant tout ce folklore culinaire autour de La naissance: des goûters, des chocolats, du vin chaud, des marrons grillés, des dindes, des poulardes, des chapons, des bûches, des… et toujours DE Noël … vous vous arrêtez quand ?

J’ai souri à mon dialogue imaginaire.

Et en vrai, j’ai trouvé une réponse à leur donner à mes santons un tantinet grognons.
La table, Sa table mes amis, est Son lieu de fête. Regardez où Jésus, un peu plus tard, a trouvé bon de nous laisser l’Essentiel de sa Parole ?

 

 

En attendant nos réveillons et ses préparatifs… bon dernier dimanche d’Avent !

à demain 😉

 

Proches

Vingtième soir

 

On s’approche et ce sont les vacances. C’est le plus doux moment pour ma crèche, mes vacances. Enfin, je vais prendre mon temps d’être là, tout près. Proche. Pour marcher vers l’étable, allumer les bougies et les laisser brûler longtemps, et contempler.
On s’approche et ce sont les vacances. La dernière journée au collège était plus que chouette du matin avec les élèves jusqu’à il y a un instant avec les collègues. Enfin, on a pris un peu de temps pour être là, ensemble. Proches, et se dire au revoir doucement.
On s’approche, Noël est à nos portes. Je vais le laisser entrer vraiment. Autour de ma crèche qui L’attend, au bord de ma cuisine qui va sentir bon les petits plats pour mes enfants, ma famille, les uns et les autres, au cœur de mon église qui se pare déjà.
Je vais me faire proche.

Déjà vingt soirs à décliner le temps et je mesure soudain combien il passe vite si on ne s’arrête pas. C’est ce que ma crèche m’a invitée à faire depuis vingt soirs déjà, m’arrêter un peu pour Lui faire une petite place un peu plus grande. Plus proche.

Quelques jours encore, quelques soirs, je serai là pour vous raconter encore quelques petites histoires de crèche, précieuses… et proches.  😉

À demain

Depuis 18 jours

Dix-huitième soir

 

Vous savez depuis toujours, ils vont de paire. Je crois bien que jamais, je ne les avais fait l’un sans l’autre.
Mais voilà.
Cette année, le premier dimanche de l’Avent, j’étais déjà trop crevée pour filer à la jardinerie et les 15 jours qui ont suivi, je me suis battue avec tous les microbes de la terre qui passent du nez jusqu’aux bronches pour tenir le coup et en classes, et aux conseils de classes et en réunion de parents. Même pour venir ici, en vrai. 😉
Non, absolument rien d’héroïque. Faut pas exagérer Corine. Juste le travail un peu mal fichue et le repos dès franchi le seuil de la maison. Finalement, c’était le bon choix puisque je suis guérie.

Mais voilà, j’ai installé ma crèche au premier dimanche de l’Avent sans le moindre sapin.

Et cela faisait 18 jours qu’elle me faisait de l’œil ma petite crèche, seule avec son tout petit arbre de lumière, l’air de dire mais tu vas le chercher quand ton roi des forêts ?

C’était cet après-midi.
Et c’était la fête.

Dès la route vers la jardinerie, la joie au cœur. Puis dedans où on a attendu le petit vendeur dans l’air glacé du dehors. Même qu’il est arrivé avec la mine enjouée, le grand sourire en regardant le sapin que j’avais choisi ( c’est toujours moi qui choisis 😉 )
-Vous avez raison, il est beau celui-ci: petit mais dodu !

Dans le salon, le petit dodu a trouvé sa place. Bien large, juste sous l’escalier, le nez à regarder par la fenêtre. J’en ai profité pour faire faire un demi tour à chaque santon, histoire qu’ils voient eux aussi. Je crois qu’ils ont bien aimé. J’ai juste laissé Marie et Jo filer leur course histoire qu’ils arrivent à l’heure.
Puis, j’ai sorti le carton. Les boules dorées, les rouges, les brillantes, les étoiles, les petits personnages, quelques guirlandes. Vous savez, il y a quelque chose de très doux à reconstruire tous les ans, à redécorer avec les mêmes objets, à recommencer. On a l’impression que, malgré tout, la vie continue d’être drôlement belle. Et c’est bon.

Depuis toujours, ils vont bien ensemble. Mon sapin et ma crèche. Il était temps que Noël soit installé bien complétement dans la maison.
Parce que vous savez, mine de rien, on a beau dire, on a beau faire, une petite étable avec le Sauveur du monde sans rien qui dise la joie, qui brille, qui éclate un peu autour pendant 18 jours, je vous assure, c’est pas pareil. Et ne me racontez pas le contraire. Je crois savoir l’Essentiel.

Enfin, on dirait bien qu’ici, Noël a enfin pris ses quartiers. Puisse-t-il rester. Longtemps. 🙂

à demain !